HGO – c’est parti

On n’est jamais prêt à écrire un bouquin – ça fait partie des règles occultes de l’univers – et ce n’est jamais non plus le bon moment de s’y mettre. Je vais donc profiter des vacances scolaires, des vadrouilles estivales & de l’année sabbatique pour *enfin* faire ce petit livre argentin qui m’obsède. Il me manque encore des pans entiers de doc, un grand fichier Excel de récap chronologique que je ne compilerai sans doute jamais, l’impression d’avoir bossé suffisamment, d’être assez équipé pour me coltiner à ce récit. J’ai trop causé du projet depuis des mois pour me sentir à la hauteur – mon but est trop précis, mon ambition trop folle. J’ai mis du temps à trouver la contrainte qui me permette d’ignorer tout ça, le truc pour me pousser à un nouvel endroit et me forcer à bosser.

L’idée m’est venue en lisant des bédés d’Oesterheld, des commentaires sur son Eternaute. Tous ses boulots, ou presque, ont été réalisés en feuilleton et plus ou moins en impro, un épisode après l’autre, avec des impératifs de chutes, de twists chaque quatre ou cinq planches. Ce rythme souvent dément, forcé par la profusion des boulots qu’il menait de front, se ressent particulièrement dans ses derniers travaux, ses œuvres les plus politiques. Oesterheld dicte les scénars de La guerre des Antartès au téléphone, découpant jusqu’aux points de suspension des dialogues – « un point, un point, un point » – pour se laisser le temps de réfléchir à la case suivante. Ce côté pop, ce côté pulp est une dimension cruciale de son boulot, et découle mécaniquement des conditions matérielles de sa production. C’est comme ça aussi qu’a été écrit Watchmen, me semble-t-il, un chapitre après l’autre, sans plan, en speed. On peut trouver pires modèles.

Et donc. 

Je vais tenter d’écrire le premier jet de ce bouquin en feuilleton hebdomadaire, au fil de l’été 2020. Ça devrait commencer début juillet et se clore à la mi-septembre. Peut-être que je serai forcé d’arrêter en chemin. Peut-être que je me rendrai compte que ça ne marche pas, ou que ça ne suffit pas. Dans tous les cas, le livre final – le livre publié, celui qui existera dans le futur de mon futur – sera différent. A minima, édité. Mais le feuilleton aura existé, il m’aura permis de tirer le texte, de lui imposer une forme.

Si ça vous intéresse, j’aurai besoin de quelques complices pour m’accompagner dans ce voyage, et pour m’obliger – des témoins, des lecteurs enfin. Une petite poignée ou deux, si vous êtes curieux de voir comment je bricole. Ce sera brut, peu relu, plein de pains, maladresses, erreurs, fautes. Ce sera irrégulier et sans doute fendu ici et là –, mais j’espère aussi qu’il y passera quelque chose, une lumière, un geste. On verra.

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Ensuite vous recevrez, sans obligation de rien, un chapitre du livre par semaine dans votre mail, et jamais quoi que ce soit d’autre. Vous pourrez bien sûr vous désinscrire à l’envi. Si vous prenez le train en route, les chapitres déjà envoyés ne vous seront pas repostés – vous devrez inventer vous-même le début de l’histoire, comme lorsque vous tombiez, au kiosque, sur une série en cours. Vous êtes invités à m’écrire à l’adresse de contact si vous le souhaitez, j’en serai même plus qu’heureux, mais sachez que je n’ouvrirai aucun message avant d’avoir fini d’écrire, pour ne pas risquer de me couper les jambes. Je vous invite à une forme de complicité bizarre et asymétrique, un compagnonnage silencieux – en espérant que vous y trouverez, vous aussi, votre compte.

D’avance un grand merci et à tout vite !